mercredi 14 novembre 2012

Mandala de Jung - Systema Mundi Totius

Système du monde entier
 «C’est le premier mandala que j’ai réalisé, en 1916,complètement inconscient de ce qu’il signifiait.»

Ce mandala, précurseur de la série qui allait illustrer le cheminement intérieur de Carl Jung, a été conçu lors de l'inspiration qui a abouti au fameux Sept sermons aux morts, écrits dont il y aurait tellement à dire, tant sur son profond décalage avec le reste de son œuvre que sur les révélations personnelles exprimées qui ont guidées le psychologue toute sa vie durant.
 
La première publication de cette figure, anonyme à cette occasion, date de 1955 (Jung avait alors tout juste 80 ans). 
Le commentaire de la figure était fourni par l'auteur lui-même.

Nous avons ajouté en astérisque quelques annotations complémentaires.

«Il représente le paradoxe que constitue un microcosme à l’intérieur d’un macrocosme, et ce qui les oppose. Tout en haut, on peut voir la figure du jeune garçon dans l’œuf ailé; appelé Erikèpaios ou Phanès, en tant que créature spirituelle, il rappelle des dieux orphiques*. Sa sombre figure antithétique dans les profondeurs des Enfers est ici désignée comme Abraxas. 
Représentant le «dominus mundi», maître du monde physique, c’est un créateur de nature ambivalente. De son corps jaillit l’arbre de vie portant l’inscription «vita» (la vie) auquel fait pendant, dans la partie supérieure, un arbre lumineux ayant la forme d’un candélabre à sept branches et désigné par les mots «ignis» (le feu) et «Eros» (l’amour). 
Sa lumière est dirigée vers le monde spirituel de l’Enfant divin. 

L’art et la science appartiennent également à ce royaume spirituel, l’art étant représenté sous la forme d’un serpent ailé et la science sous celle d’une souris, elle aussi ailée (symbole d’une activité qui creuse des trous!). – Le candélabre est basé sur le principe du trois**, chiffre sacré (deux fois trois flammes et une grande flamme au centre), tandis que le monde inférieur d’Abraxas est caractérisé par le chiffre symbolisant l’Homme naturel, le cinq*** (son étoile comptant deux fois cinq branches). 

Les animaux accompagnant le monde naturel sont un monstre diabolique et une larve. Cette dernière symbolise la mort et la renaissance. 

Le mandala est également divisé à l’horizontale. Sur la gauche, d’une sphère interne symbolisant le corps ou le sang, surgit un serpent qui s’enroule autour du phallus, en tant que principe générateur****. 
Le serpent, sombre et lumineux, fait allusion au royaume ténébreux de la Terre, de la Lune, et du Vide (et est, par conséquent, appelé Satan). 

Le resplendissant royaume de la plénitude se trouve sur la droite, là où la colombe du Saint-Esprit s’envole du cercle lumineux «frigus sive amor dei» [froid, ou l’amour de Dieu] tandis que la sagesse (Sophia) se déverse sur la gauche et sur la droite d’un double calice – Cette sphère féminine est celle du Ciel. – La sphère la plus grande, caractérisée par des lignes en zigzag ou rayons, représente un soleil intérieur; dans cette sphère, le macrocosme est encore une fois reproduit – le haut et le bas étant toutefois inversés, 
comme dans un miroir. 

Ce macrocosme se répète à l’infini, son image devenant toujours plus petite, jusqu’à ce que le centre le plus intime – le microcosme proprement dit – soit atteint.»

*L'orphisme est un mouvement religieux de la Grèce antique, aux courant multiples et complexes, dont la croyance fondatrice est la double origine de l'homme (divine et des Titans, créatures puissantes, "telluriques")
**Le trois est associé au principe, l'unité sortant d'une dynamique (les opposés 2 et le troisième terme 1)
***Voir l'homme de Vitruve de De Vinci

dimanche 4 novembre 2012

La libido selon Jung (1)

 

"On peut dire que dans le domaine psychologique le concept de libido a la même signification que celui d'énergie dans le domaine de la physique depuis Robert Mayer*".


 
Cette phrase, extraite de Les métamorphoses de l'âme et ses symboles (page 237), contient, selon nous, le ferment qui inspirera l’œuvre de Jung ; cette ouverture vers "les autres sciences" marquera aussi un point de rupture avec Freud qui tentait alors d'enraciner les fondations de la psychanalyse naissante (au risque, peut-être, de l'enfermer dans des dogmes peu compatibles avec la nature psychique).
Pour le zurichois, la sexualité n'est qu'une des formes que revêt l'énergie vitale psychique, qu'il associe à la libido. Il est bon de noter que Freud lui-même, dans ses essais plus tardifs sur la théorie sexuelle, reconnaîtra que la libido peut être contenue dans des forces instinctives (pulsions) autres que sexuelles.
Essayons de poser quelques éléments de définition et d'encadrement de la notion de libido chez Jung.

Unité d'intensité psychique
 
La libido représente l'intensité du processus psychique, sa valeur psychologique en quelque sorte. 
Toutefois il ne s'agit pas d'une valeur attribuée, d'ordre moral, esthétique ou intellectuel ; la valeur psychique correspond à la force déterminante du processus, qui se manifeste par des états définis ou "rendements psychiques".

Psychodynamisme indifférencié
 
Ce terme abscons définit la vie de l'âme selon Jung.
Comme la précédente définition de la libido l'évoque, Jung postule l'existence d'une énergie vitale psychique en mouvement ET, selon le premier principe de la thermodynamique de Mayer, en conservation de quantité.
Pour faire simple, la libido obéit à un flux constant et naturel, à l'instar de la circulation sanguine dans le corps,  définissant finalement "l'activité" d'une strate ou l'autre
de la psyché
La libido circule à la fois dans l'inconscient et la conscience mais, répondant au principe de conservation, ce qui est apporté à l'un est toujours déduit de l'autre...

La libido n'est pas seulement celle qui crée, forme et engendre ; c'est également une poussée vers un but que l'on pourrait résumer simplement par l'accroissement de la conscience humaine.
Le cours de la libido n'est pas linéaire; Jung a décelé que la dynamique psychoénergétique est "oscillatoire".

Les cycles régression/progression
"Si la libido reste fixée au royaume merveilleux du monde intérieur, alors l'homme est devenu une ombre pour le monde d'en haut, il est comme mort ou gravement malade. Mais si la libido réussit à se libérer et à remonter vers le monde d'en haut, alors se produit un miracle: le voyage aux enfers a été pour elle une fontaine de jouvence et de la mort apparente surgit une nouvelle fécondité".        Métamorphose... p487
Voici qui exprime clairement cette notion de cycle...
Prenons le cas d'école d'un individu à l'évolution psychique optimal. 
La libido s'investit dans la conscience qui va alors se distinguait des contenus de l'inconscient, et se faisant s’accroître en intégrant ce qui "n'était pas", c'est la phase de progression
Mais le processus "épuise" cette énergie et des symptômes de désunion de l'individu apparaissent.
En fait, la libido a changé d'orientation et plongé dans l'inconscient, donnant alors vie à ce qui "était dans l'ombre" (images, souvenirs, sentiments, sensations, etc.). L'émergence de ces "matériaux inconnus" exerce une influence grandissante sur la conscience, bien souvent en dépit de la résistance désespérée de l'intelligence claire. C'est la phase de régression, la fameuse descente en enfer mentionnée par Jung.

Pour résumer, le mouvement régressif puise dans l'énergie indifférenciée et fait gagner en force vive, diminuant la différenciation alors que le mouvement progressif augmente la capacité discriminative tout en faisant perdre de la force, de l'intensité au mouvement opérant.  
La conjonction du mouvement permet donc une différenciation grâce à la force extraite de l'indifférenciation.


La force du symbole

La naissance du symbole stoppe la régression de la libido dans l'inconscient.
La régression devient progression, le refoulement, flux. 
Ainsi est brisée la puissance attractive de la profondeur première.
Le salut se situe donc dans le symbole (voir à ce sujet ce billet) qui peut comprendre et unir en soi conscient et inconscient.
 
*Robert MAYER (1814-1878), médecin et physicien allemand, connut notamment pour sa formulation du premier principe de la thermodynamique.

Suite, voir Libido cycle progression/régression 

jeudi 1 novembre 2012

L'énergétique psychique - Format poche



Ma présence sur "la toile" est rare depuis quelque temps et les billets approfondis absents...la vie est ainsi faite de certains cycles, que l'on sait déceler ou pas, mais qu'il faut toujours essayer d'accepter avec sérénité. 
En attendant que "la roue tourne", je vous propose une information concernant la sortie, relativement récente, d'un ouvrage de Jung, au format poche. Il s'agit en fait d'une compilation de plusieurs essais courts datant de périodes diverses. 
Le titre "L'énergétique psychique" est un peu trompeur car seule la première partie de l'ouvrage traite réellement de la thématique de la libido selon Jung, les autres chapitres sont, en quelque sorte, des études sur  les flux de libido et son expression visible chez l'homme...on notera l'approche résolument orientée vers l'occultisme (la croyance aux esprits, les phénomènes paranormaux, etc).

J' ai choisi cette courte présentation car je dois prendre le temps de réaliser un petit écrit sur le thème de la libido pour une amie très chère, cybervoisine pour tout dire...me voici donc sur les rails.